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jeudi 3 juillet 2008

Memory lane

30 septembre 1990. C’etait un dimanche pluvieux je crois. Il y avait un halo bleu dans sa chambre comme pour creer un espace rien qu’a nous. Bohemian Rhapsody de Queen jouait sur la stereo.

L’excitation. L’apprehension. Le plaisir. La sensation tellement nouvelle de le sentir en moi, de cet unisson corporel ressenti pour la toute premiere fois, pour lui, pour moi et qui materialisait si parfaitement nos sentiments, eux aussi intenses, nouveaux et renversants.

Ce soir la, en rentrant chez moi apres mon trajet en corail, je me suis refugiee dans la salle de bains, pour etudier mes nouveaux traits de femme. J’etais persuadee que ce bouleversement et ce que je croyais etre mon passage a l’age adulte se voyait sur mon visage et j’etais d’ailleurs convaincue – et paniquee a l'idee - que ma mere ne manquerait pas de s’en apercevoir.

Si jamais je me trouve un jour dans la meme situation que les personnages de Stephan Merrill Block dans The Story of Forgetting – que je viens de devorer – j’espere que ce sera une des pepites qui survivra dans mes cellules intactes.

jeudi 24 janvier 2008

Bad sleep


Je suis partagee entre l’inquietude, la culpabilite et avouons-le aussi le soulagement un peu honteux d’etre tellement loin que je ne peux physiquement rien faire.

Ma grand-mere, dont l’etat porte desormais le tampon officiel d’Alzheimer va de moins en moins bien chaque jour. Ma mere n’en peut plus, après 11 mois de 24h/24 et de 7j/7 qui ont ete je crois encore plus difficiles emotionnellement que physiquement. Mon pere est devenu mechant (employons le mot franchement) avec ma grand-mere, mes parents sont au bord du divorce et ma mere au bord du gouffre.

Pour couronner le tout, mon frere et sa copine se sont separes la semaine derniere, elle quittant la maison avec leur fils d’un an, apres que mon frere soit revenu une fois de plus saoul d’une de ses virees entre copains quasi quotidiennes.

C’est pour ma mere que je suis le plus inquiete. Elle m’a semblee vraiment suicidaire au telephone. J’ai pense lui envoyer des fleurs. Puis j’ai change d’avis. Je lui envoie a la place un DVD des derniers exploits de Little Poppet, en esperant que cela la fera rire plutot que pleurer.

J’ai l’impression de porter un fardeau, invisible mais bien present, rempli de choses auxquelles je suis tres attachee mais de plus en plus lourd a porter et j’ai quelquefois la tentation de vouloir le jeter sur le bord de la route…

mardi 6 novembre 2007

Head over heels


Je savais qu'il n'avait jamais vraiment quitte mon coeur ni ma petite tete mais il y a repris une presence presque insolente depuis quelques jours.
Il a suffit de quelques mots, les miens et surtout les siens, sur ce blog, pour que tout remonte a la surface, a fleur de peau.
Ma raison me meprise et me martele: c'est juste la nostalgie de tes 17 ans, arrete tout de suite et concentre toi sur ta vraie vie.

Si je n'habitais pas a 20 000 km, je serais tentee de sauter dans un train et de me confronter au reel. J'ai deja failli le faire il y a 2 ou 3 ans. J'aurais tant a y perdre pourtant, surtout maintenant. Mais mon petit coeur n'avait pas battu aussi fort depuis belle lurette, meme mon souffle s'emballe en y pensant et j'ai des papillons dans l'estomac.

Pour quelques mots. Mais les siens ont toujours eu cet effet magique sur moi.

mercredi 24 octobre 2007

1917

Elle a grandi dans une ferme ou ses parents etaient ouvriers, dans un petit village de Saone et Loire. Elle etait la premiere fille, apres 6 garcons. Une autre fille est nee, 2 ans apres. Elles avaient un petit agneau apprivoise appellee Nenette que l'on voit a cote des 2 soeurs sur l'une des rares photos de l'epoque.
Elle a quittee l'ecole a 12 ans, comme tout le monde. Je suppose qu'elle travaillait a la ferme ensuite. Entre les animaux, les recoltes, les lessives au lavoir du village il y avait de quoi s'occuper.
Elle a rencontre son futur mari dans un bal. Il venait de la petite ville d'a cote. Un marechal ferrand, lui aussi issu d'une famille nombreuse mais dont le pere travaillait aux chemins de fers.
Ils se sont maries en 1943, annee morose. Elle avait un tailleur blanc creme tres bien taille et un petit chapeau sur la tete.
En 1944 leur premier enfant est ne. Le garcon est arrive 6 ans plus tard et enfin une seconde fille en 1953.

Juste apres la naissance du premier enfant, ils se sont installes dans un petit appartement dans la petite ville. L'atelier etait au bout de l'arriere cour, c'etait pratique. Les trois enfants etaient doues a l'ecole. La petite entreprise avait un peu de mal alors que les voitures remplacaient les chevaux petit a petit.

Le 31 decembre 1963, elle a vu mourir son mari dans la petite cuisine qui surplombait l'arriere cour. Ils ont le coeur fragile dans cette branche de la famille, ce fut foudroyant. La fille ainee dut abondonner ses reves de devenir chimiste et partir directement a l'ecole normale, pour toucher un salaire d'institutrice et subvenir aux besoins de la famille. La petite continua l'ecole. Le fils lui, dut quitter ses bancs pour devenir apprenti a l'usine locale. Termine Dostoyevsky, a lui les 40h a la chaine et les blagues grossieres de ses collegues.

Elle dut aussi trouver un travail, pour la premiere fois de sa vie. Elle devint aide a la cantine du college. Les enfants l'adoraient.

En mars 1989, en allant etendre son linge dans le grenier, elle a trouve son fils allonge dans une mare de sang. Il s'etait tire un coup de fusil dans la bouche. Il a survecu grace a de nombreuses operations et une longue psychotherapie et alors qu'il commencait a aller vraiment mieux, lui aussi est mort d'une crise cardiaque devant elle un matin de mars 1992, dans la petite cuisine en formica.

Elle a eleve sa deuxieme petite fille, celle de sa fille cadette mere celibataire un peu depressive, dans ce meme appartement sans confort, avec les toilettes sur le palier et le papier peint a fleurs. Le poele a charbon a ete remplace par des convecteurs electriques dans les annees 90 et une petite salle de bain a ete ajoutee a ce moment la aussi.

Aujourd'hui, on a resilie le bail. Les affaires sont triees, vendues, donnees. Les meubles de peu de valeur partent chez Emmaus. Toute une vie de souvenirs balayee.

Elle ne veut meme pas y retourner une derniere fois. Elle n'y a pas mis les pieds depuis sa chute du mois de mars. Elle se laisse porter un jour apres l'autre, se laisse reprimander comme une enfant de 4 ans par sa fille et son beau-fils et passe de plus en plus de temps au lit, dans cette maison qui n'est pas la sienne a quelques 80 km de chez elle. Pour la premiere fois elle veut commander des fleurs pour la tombe de son mari et de son fils plutot que d'y aller pour la Toussaint.

Ma grand-mere a 90 ans et plus rien devant elle. Je lui souhaite de partir le plus vite possible.